Délais de paiement : comment calculer la "fin de mois" (C. com., L. 441-10) ?
L’article L. 441-10 du code de commerce prévoit les délais de paiement.
A noter : cet article est issu de l’article 6 du projet de loi de modernisation de l’économie.
Il existe trois délais. Si le contrat ou les conditions générales de vente ne prévoient rien, le délai de paiement ne peut dépasser 30 jours après la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation. Les parties peuvent convenir d’un délai plus long mais qui ne peut dépasser 60 jours après la date d’émission de la facture. Par dérogation, un délai maximal de 45 jours “fin de mois” après la date d'émission de la facture peut être convenu entre les parties, sous réserve que ce délai soit expressément stipulé par contrat et qu'il ne constitue pas un abus manifeste à l'égard du créancier.
Comment se calcule ce dernier délai de 45 jours ?
A noter : le délai de 45 jours trouve son origine dans l’article 21 de la loi n° 2008-776.
Il existe en effet deux modes de calcul : soit 45 jours à compter de la fin du mois d’émission de la facture (par exemple, si la facture est émise le 15 janvier, le délai de 45 jours courent à compter du 31 janvier) soit 45 jours à compter de la facture, le dernier jour du mois de la fin du délai s’appliquant (par exemple, si la facture est émise le 15 janvier, le délai expire le 1er mars, le paiement intervient à la fin du mois, soit le 31 mars). Le délai pourrait ainsi dépasser les 60 jours maximum.
Lors des débats parlementaires devant le Sénat sur ce qui deviendra la loi n° 2008-776, il avait été indiqué que le délai se calculait à compter de la fin du mois : fin de mois + 45 jours (Rapport n° 413 (2007-2008) fait au nom de la commission spéciale, 24 juin 2008 : “plafonner à 45 jours fin de mois (c'est-à-dire dont la computation débute à la fin du mois)”).
A noter : On peut se demander si l’auteur du rapport du Sénat avait bien appréhendé le sens de la réforme lorsqu’il a écrit ces quelques lignes. En se référant au rapport de l’Assemblée nationale sur ce même projet de loi de 2008, on peut lire en effet « En prévoyant clairement un plafonnement du délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues, qui ne peut dépasser quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d’émission de la facture : la fixation par la loi d’un délai maximum s’appliquant à la généralité des relations entre clients et fournisseurs apparaît comme une innovation importante, qui vise donc à rapprocher les délais moyens de paiement observés en France (66 jours) de ceux constatés en moyenne en Europe (57 jours) ; la solution du plafonnement par la loi des délais de paiement convenus a, d’ailleurs, montré son efficacité dans le domaine des transports avec la loi du 5 janvier 2006 ou celui des produits frais ». On voit donc bien que les 60 jours étaient un maximum.
Mais cette méthode sera appliquée par la suite par certains textes édicté après la loi (exemple décret 2009-859).
Le ministre de l’économie a reconnu que la loi ne précisait pas la méthode de calcul, donc que les deux modes de calcul étaient possibles, mais pour éviter les manipulations et sanctions, les parties devaient le prévoir contractuellement dès le début (voir réponses du ministre de l’économie en 2009 et 2015 par exemple : “Le mode de computation du délai de 45 jours fin de mois n'est pas imposé par la loi. Les opérateurs ont ainsi la liberté de le calculer de deux manières : soit en ajoutant 45 jours à la fin du mois d'émission de la facture, soit en ajoutant 45 jours à la date d'émission puis en allant jusqu'à la fin du mois. Le mode de calcul retenu doit toutefois être convenu au préalable entre les partenaires commerciaux afin d'éviter toute ambiguïté”).
La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) l’a confirmé au tout début de la réforme dans son avis du 28 novembre 2008 (voir annexe 9 de ce rapport qui reprend l’avis de la DGCCRF de 2008 : '“Comment comprendre le mode de computation des 45 jours fin de mois ? – La pratique la plus usuelle consiste à comptabiliser les 45 jours à compter de la date d'émission de la facture, la limite de paiement intervenant à la fin du mois civil au cours duquel expirent ces 45 jours. Toutefois, il est également envisageable de comptabiliser les délais d'une autre façon, consistant à ajouter 45 jours à la fin du mois d'émission de la facture. “).
En tout état de cause, il convient de préciser le mode de calcule. soit aux termes de l’accord soit dans les conditions générales de vente. A défaut, ce sont les règles de droit commun qui s’appliquent (30 jours après la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation).
Avocat au barreau de Paris