Quels sont les droits légaux en droit des sociétés des salariés d'une SAS dans le cadre de sa gestion ?
Question : quels sont les droits légaux en droit des sociétés des salariés d’une SAS dans le cadre de sa gestion ?
Réponse : les droits des salariés sont exercés à travers leurs représentants à savoir aujourd’hui le comité social et économique qui remplace progressivement les délégués du personnel et le comité d’entreprise. On distingue le comité social et économique de SAS d’au moins 11 salariés et de moins de 50 salariés du comité social et économique de SAS d’au moins 50 salariés. Il existe quelques cas où les salariés sont consultés personnellement, mais ces cas ne seront pas abordés ici (cession de la majorité du capital : article L. 23-10-1 du code de commerce ; vente du fonds de commerce : article L. 141-23 du code de commerce).
Le comité social et économique de SAS d’au moins 50 salariés
Participation
Deux membres de la délégation du personnel du comité social et économique (cadres techniciens et agents de maîtrise, employés et ouvriers) assistent avec voix consultative à certaines réunions (combinaison des articles L. 2312-76 et L. 2312-72 du code du travail). Ils reçoivent également communication des mêmes documents que ceux qui assistent à ces réunions et peuvent soumettre les voeux du comité (article L. 2312-73 du code du travail). Les réunions sont normalement celles du conseil d’administration ou du conseil de surveillance. Ces organes n’étant pas ceux prévus de plein droit pour les SAS (voir les organes de représentation à l’article L. 227-6 du code de commerce), le code du travail laisse aux statuts de la SAS le soin de préciser l’organe social auprès duquel les membres de la délégation du personnel exercent leurs droits. Généralement, les statuts prévoient le président, ce qui n’est pas l’organe le plus adapté (pas de réunions, pas de communication de documents).
A noter : en pratique, pour éviter tout risque contraventionnel d’entrave (L. 2317-1 du code du travail), il serait recommandé, si le président (organe non collégial) est l’organe auprès duquel s’exerce les droits du comité, d’informer les membres du comité des décisions importantes du président (telles que l’arrêté des comptes), dans la mesure où deux membres du comité sont sensés assister “avec voix consultative à toutes les séances du conseil d'administration ou du conseil de surveillance”. Mais à bien y regarder, l’extension n’est pas si évidente car les organes qui sont visés par la loi ne sont pas les organes de direction mais les organes de contrôle ou de surveillance (ce que n’est pas le président d’une SAS au même titre que le directeur général ou le directoire d’une société anonyme). Par ailleurs, le titre de la sous-section (“Participation aux conseils d'administration ou de surveillance des sociétés”) n’est pas un titre générique mais un titre réservé aux sociétés anonymes.
On peut se demander lorsque les statuts de la SAS prévoient un organe collégial ayant les mêmes pouvoirs qu’un conseil d’administration ou qu’un conseil de surveillance d’une société anonyme ou des organes collégiaux ayant la dénomination de conseil d’administration ou de conseil de surveillance (quelque que soit leurs pouvoirs), si les membres de la délégation du personnel ne retrouveraient pas leurs prérogatives (les textes commençant par “Dans les sociétés” et non par “Dans les sociétés anonymes”). Un parallèle pourrait être fait avec l’avis du comité de coordination du registre du commerce et des sociétés qui a estimé que dans les SAS “Dans une société par actions simplifiées, les membres d’un organe statutaire, quelque soit son intitulé, auxquels les statuts confèrent individuellement ou collectivement le pouvoir de diriger, gérer ou engager à titre habituel la société doivent être déclarés au RCS” et inversement “les membres d’un tel organe, dès lors qu’il est qualifié ‘conseil de surveillance’, doivent être également déclarés au RCS quelles que soient la nature et l’étendue de leurs pouvoirs”. En d’autres termes, les organes collégiaux de la SAS qui ont les mêmes pouvoirs que ceux que l’on retrouve dans les SA sont traités de manière similaire vis-à-vis du registre du commerce et des sociétés.
Comptes annuels et prévisionnels
Le comité social et économique reçoit communication des comptes annuels, du rapport de gestion, du rapport spécial sur les conventions de l’article L. 227-10 du code de commerce et, le cas échéant, communication des comptes consolidés, du rapport sur le groupe, des rapports du commissaire aux comptes, des informations relatives à la politique de recherche et de développement technologique de l'entreprise (L. 2312-25 du code du travail). Il peut convoquer les commissaires aux comptes (même article).
Il reçoit également, le cas échéant, communication des documents de gestion prévisionnels (articles L. 2312-25 précité et R. 232-6 et R. 232-3 du code de commerce), du rapport du président ou de l’organe de direction sur l’analyse des documents prévisionnels (articles L. 232-4, R. 232-6 précité, R. 232-4 du code de commerce), du rapport du commissaire aux comptes en l’absence de rapport du président ou de l’organe de direction ou en cas d’observations sur ce rapport (articles L. 232-4 précité et R. 232-7 du code de commerce).
Assemblée des associés
Le comité social et économique peut demander en justice la désignation d’un mandataire chargé de convoquer l’assemblée générale des associés en cas d’urgence (L. 2312-77 du code du travail).
Il peut également requérir l’inscription de projets de résolutions (décisions) à l’ordre du jour des assemblées (même article). Cela signifie donc que le comité doit être préalablement informé de ces assemblées (ou des décisions à prendre par l’associé unique ou la collectivité des associés, dans les SAS, ces décisions poivant être prises en-dehors d’une assemblée si les statuts prévoient différentes formes de consultation des associés). Les modalités de demande d’inscription et d’examen sont déterminées par les statuts (R. 2312-34 du code du travail). On peut s’inspirer des règles prévues à l’article R. 2312-32 et R. 2312-33. Il convient ainsi de prévoir qui peut présenter les projets au nom du CSE, comment, sous quel délai (en prévoyant un préavis et un délai d’urgence le cas échéant), les modalités de présentation des projets, les modalités d’accusé de réception des projets. Vous souhaitez obtenir un modèle de clause, voir notre site InstruMentum en commandant la clause en précisant dans la commande “CSE”.
Deux membres du comité (désigné par le comité) dont l’un appartient à la catégorie des cadres techniciens et agents de maîtrise et l’autre à la catégorie des employés et ouvriers peuvent assister aux assemblées générales (même article). Ils sont entendus, à leur demande, lors de toutes les délibérations requérant l’unanimité des associés (même article). Cette dernière faculté exige donc une procédure d’“audience” des membres avant toute prise de décisions si les décisions ne sont pas prises en assemblée.
A noter : on sait que dans les SAS, les assemblées ne sont pas de droit surtout lorsque la société n’a qu’un seul associé. Les décisions peuvent en effet se prendre par acte sous signature privée si les statuts de la société le prévoient. L’exécution des droits visés ci-dessus (requérir l’inscription de projets de décisions à l’ordre du jour ou assister aux décisions des associés) peut donc soulever des difficultés (certains estimant que ces droits ne peuvent s’exercer en cas de décisions par acte sous signature privée, d’autres estimant que le risque de délit d’entrave nécessite de trouver des solutions permettant l’exercice de ces droits).
A noter : les statuts de SAS doivent, en tout état de cause, fixer les règles relatives aux modalités d'examen des demandes d'inscription des projets de résolution adressées par les comités sociaux et économiques (R. 2312-34 du code du travail).
A noter : les associés de SAS employant 300 salariés ou plus sont sensés recevoir le bilan social, le texte visant les “sociétés par actions” sans autre distinction, incluant donc les SAS, mais visant des textes, pour sa communication, uniquement applicables aux sociétés anonymes et, par extension, aux sociétés en commandite par actions (L. 2312-32 du code du travail).
Gestion courante
Le comité social et économique peut émettre des avis et des vœux dans l’exercice de ses attributions consultatives (L. 2312-15 du code du travail) ou soumettre des vœux (L. 2312-73 du code du travail).
Il est consulté annuellement en l’absence d’accord visé à l’article L. 2312-19 du code du travail (L. 2312-22 du code du travail).
A noter : le comité social et économique aurait la qualité (article 31 du code de procédure civile) et l’intérêt à agir pour demander la désignation d’un administrateur provisoire (cour d’appel de Paris, 15 octobre 2021, n° 20/07190). La désignation d’un administrateur provisoire nécessite des circonstances qui rendent impossibles le fonctionnement normal de la société et la menace d’un péril imminent.
Modification de l’organisation juridique
Dans certains cas non expressément énumérés, le comité social et économique devra être informé et consulté. Il s’agit des cas entraînant une “modification de [l’]organisation […] juridique” de l’entreprise (article L. 2312-8 du code du travail, anciennement L. 2323-33 du même code). Il peut s’agir des opérations de fusion, de scission, de cession partielle de fonds de commerce ou d’une branche d’activité (soumis ou non au régime des scissions), de modification de l’organisation de la direction (par exemple passage d’une présidence à un mode d’organisation collégial de type directoire), de transfert du siège social.
Il s’agit également, pour les petites et moyennes entreprises, du changement de contrôle de la société (voir article L. 23-10-7 du code de commerce) ou de la cession du fonds de commerce (voir article L. 141-28 du code de commerce) le législateur ayant présupposé que l’information-consultation devait être faite.
Opération de gestion
Le comité social et économique peut également demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion (article L. 225-231 du code de commerce).
Récusation ou révocation d’un commissaire aux comptes
Le comité social et économique peut demander en justice la récusation (article L. 823-6 du code de commerce) ou la révocation (article L. 823-7 du code de commerce) d’un commissaire aux comptes
Situation économique préoccupante
Le comité social et économique peut demander lorsqu’il “a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise”, au dirigeant de lui fournir des explications (articles L. 2312-63 du code du travail et L. 234-3 du code de commerce).
Il reçoit, en cas de mise en jeu par le commissaire aux comptes de la procédure d’alerte sur “des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation”, communication de la réponse du président ou de l’organe de direction (articles L. 234-2 et R. 234-5 du code de commerce), des décisions du président ou de l’organe de direction suite à l’invitation du commissaire aux comptes (articles L. 234-1 et R. 234-2 du code de commerce) ou le rapport du commissaire aux comptes en cas de carences du préisident ou de l’organe de direction (articles L. 234-1 et R. 234-3 et R. 234-6 du code de commerce).
Comité social et économique des petites entreprises
Le comité social et économique de SAS d’au moins 11 salariés mais de moins de 50 salariés disposent des mêmes prérogatives que celles prévues, en cas de “faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise” ou en cas de procédure d’alerte, pour le comité social et économique de SAS d’au moins 50 salariés.
Avocat au barreau de Paris