Capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social et reconstitution rapide : faut-il publier et déposer ? (C. com., L. 223-42, L. 225-248)

On sait que si, du fait de pertes constatées dans les documents comptables, les capitaux propres de la société deviennent inférieurs à la moitié du capital social (L. 223-42, L. 225-248), la décision prononçant ou ne prononçant pas la dissolution doit être publiée et déposée et inscrite au registre du commerce et des sociétés (R. 223-36, R. 225-166).

Ces formalités importantes pour l’information des tiers (“garantie pour les créanciers sociaux”, voir réponses ministérielles ci-dessous) doivent-elles être respectées lorsque, entre la date de clôture des comptes qui constate cette situation et l’approbation de ces mêmes comptes, la situation a été rétablie (par exemple par une augmentation de capital) ?

En effet, il n’existe aucun délai spécifique pour procéder aux formalités de publicité et de dépôt si ce n’est le délai général d’un mois de l’article R. 123-45 du code de commerce (mais est-on vraiment dans un cas de rectification ou d’adjonction aux énonciations spécifiques mentionnées par cet article, nous ne le croyons pas).

Une reconstitution peut-elle être constatée par les associés après la clôture de l’exercice (parfois avant même le délai de 4 mois prévu pour se prononcer sur la dissolution anticipée) ?

Absolument.

A noter : sur la possibilité de constater la reconstitution des capitaux propres avant même l’arrêté de l’exercice au cours duquel les pertes ont été constatée. Certains commissaires aux comptes estiment qu’il faudrait établir une situation intermédiaire pour constater la reconstitution des capitaux propres. D’autres estiment que tant que la société est dans le délai de régularisation, elle peut le faire à tout moment. En effet, les textes disposent que “la société est tenue, au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue, de reconstituer ses capitaux propres […] ou de réduire son capital social […].” (et non pas de constater la reconstitution).

A noter : la reconstitution peut intervenir au cours de la même assemblée (ou décision des associés) que celle constatant les pertes et se prononçant sur la dissolution anticipée (voir réponses ministérielles ci-dessous).

Cette reconstitution dispense-t-elle de publier et de déposer la “perte” puis la reconstitution ?

A noter : sur la nécessité d’une résolution ou décision spéciale des associés sur la reconstitution (voir avis n° 2013-034 comité de coordination du registre du commerce et des sociétés).

Deux réponses ministérielles considèrent que la publication et le dépôt doivent être réalisés même en cas de reconstitution rapide (Assemblée nationale, 1970, réponse n° 9331 (p. 33 du Pdf) et 2006 n° 104752). Le raisonnement est assez simple. Quand bien même il y aurait reconstitution des capitaux propres, les dispositions légales imposent une “résolution” spéciale de l’assemblée générale (ou une décision spéciale des associés) sur l’éventualité d’une dissolution. Or, les textes imposent, que la dissolution ait été prononcée ou non, de publier “la résolution adoptée par l'assemblée générale”.

Les sanctions pénales ayant été abrogées en 2012 (L. 241-6 et L. 242-29), la sanction peut être, pour le dirigeant, une faute de gestion (si la société a subi un préjudice). Une action des tiers n’est pas à exclure (voir notre article sur cette question).

Matthieu Vincent

Avocat au barreau de Paris