La garantie d'actif et de passif dans les émissions de titres (augmentation de capital et autres émissions de type obligataire)

Elle est peu fréquente mais on la rencontre parfois : la garantie d’actif et de passif consentie dans le cadre d’une émission de titres (actions, actions de préférence, obligations, etc.) au profit d’un souscripteur.

A noter : pourquoi un telle garantie est parfois recommandée ? Comme en matière de cession, les garanties légales (exemple : garantie des vices cachés) ne visent qu’à couvrir les qualités substantielles des droits sociaux (1641) mais non la valeur que ces droits sociaux représentent c’est-à-dire généralement la valeur (ou la consistance) du patrimoine de la personne morale ayant émis ces droits sociaux (Cour de cassation, 23 janvier 1990, n° 87-17.521: “que [la dette fiscale] n'affectait pas l'usage des parts sociales elles-mêmes mais seulement leur valeur ; d'où il suit qu'en l'absence de clause de garantie de passif ou de révision de prix, la révélation du passif fiscal ne constituait pas un vice caché des droits sociaux cédés”). Ceci est encore plus vrai en matière de souscription de titres en numéraire pour laquelle les règles de la vente ne s’appliquent pas contrairement aux apports en nature (1843-3). Quant aux emprunts obligataires, il s’agit d’une sûreté sur le propre patrimoine de l’emprunteur.

Cette garantie peut être consentie soit par le ou les associés existants, soit par le ou les dirigeants (plus rare), soit par la société elle-même.

A noter : sur la nature de cette garantie lorsqu’elle est consentie par la société émettrice, on pourrait y voir une garantie de valeur ou une garantie de déclarations (responsabilité contractuelle, la souscription ayant une nature contractuelle et non celle d’un acte unilatéral).

A noter : certains avertissent de l’inconvénient d’une garantie consentie par les dirigeants qui serait de nature, par la suite à tendre les relations avec ces derniers dont l’implication et la motivation sont des moteurs de la réussite de l’entreprise.

A noter : la garantie consentie par la société émettrice elle-même a soulevé des interrogations notamment en matière de règles de contrariété à l’affectio societatis (1832) ou à l’intérêt social (1833), de rupture du principe d’égalité entre associés (Cour de cassation, 1er mars 1971, n° 70-10.178, 1843-2), pour les sociétés par actions : pour les sociétés anonymes de conventions dites réglementées (L. 225-38, L. 225-86), d’émission à un prix inférieur au nominal si la garantie consiste en un remboursement (L. 225-128), du prix d’émission fixé par les associés (L. 225-138, II), d’avantages particuliers (L. 225-147), dites de financial assistance (L. 225-216).

A noter : nous avons également identifié des risques de dépassement de l’objet social (voir notre article). Une décision ou résolution préalable des associés ou actionnaires serait recommandée.

Comme pour les garanties consenties dans le cadre d’une cession, la garantie est soit accordée au souscripteur (indemnisation ou remboursement/révision de la prime d’émission), soit accordée à la société émettrice (reconstitution de son patrimoine).

La garantie peut prendre la forme d’une indemnisation en numéraire (indemnisation du souscripteur) ou en droits sociaux supplémentaires (relution du souscripteur).

A noter : certains considèrent qu’une indemnisation en numéraire est parfois contradictoire avec le besoin de financement à l’origine de la souscription et que, par la suite, cette indemnisation peut fragiliser la société et ses dirigeants. Pour éviter cela, il est préférable d’envisager un plafond de la garantie qui correspondrait à la survaleur maximale estimée en cas de risques, le reliquat constituant la valeur résiduellle intrinsèque de l’entreprise (perspectives d’avenir ou goodwill). Généralement, l”indemnisation oscille entre 20,00 et 30,00 % de l’investissement.

La technique de la relution (émission de nouveaux titres) peut soulever des difficultés pratiques (“promesse” d’augmentation de capital, attribution gratuite d’actions) sauf à utiliser la mécanique de l’attribution de bons de souscription d’actions (dits ratchet) qui ne pourraient être exercés que dans certaines hypothèses ou le mécanisme de distribution préciputaire et privilégiée de dividendes via des actions de préférence (dans les deux cas, la procédure des avantages particuliers devrait être vraisemblablement suivie).

A noter : pour une convention de garantie de passif consentie à la fois par la société, son dirigeant et certains associés (Cour de cassation, 16 novembre 1999, n° 97-14.280).

A noter : pour le défaut de conseil de faire souscrire une garantie d’actif et de passif dans une augmentation de capital (cour d’appel de Grenoble, 9 juin 2022, n° 21/01687).

A noter : les deux arrêts précités “doutaient” de l’intérêt au final pour le bénéficiaire d’une garantie souscrite par la société.

Matthieu Vincent

Avocat au barreau de Paris

ASSET AND LIABILITY WARRANTY IN SECURITIES ISSUANCES (CAPITAL INCREASES AND OTHER BOND-TYPE ISSUANCES)

It is infrequent but it is sometimes encountered: the warranty on assets and liabilities granted in the context of an issue of securities (shares, preferred shares, bonds, etc.) for the benefit of a subscriber.

Note: why is such a warranty sometimes recommended under French law? As in the case of transfers, legal guarantees (e.g. latent defects) are intended only to cover the substantial qualities of the share/securities (1641) but not the value (or consistency) that these rights represent, i.e. generally the value of the assets of the entity that issued these shares/securities (French High Court, 23 January 1990, n° 87-17.521: "[the tax debt] did not affect the use of the shares themselves but only their value; from which it follows that in the absence of a warranty clause or a price revision, the disclosure of the tax liability did not constitute a latent defect in the shares transferred"). This was even more true in the case of the subscription of securities in cash, where the rules of sale did not apply, unlike contributions in kind (1843-3). As for bond loans, they are a security on the borrower's own assets.

This warranty can be granted either by the existing shareholder(s), or by the manager(s) (not usual), or by the company itself.

Note: on the nature of this warranty when it is granted by a company, it could be seen as a guarantee of value or as contractual representations and warranties.

Note: some warn of the disadvantage of a warranty granted by the managers, which would then be likely to strain relations with the latter, whose involvement and motivation are the driving forces behind the success of the company.

Note: the warranty granted by the issuing company itself has raised questions, in particular with regard to the rules of conflict with the affectio societatis (1832) or the corporate interest (1833), breach of the principle of equality between shareholders (French High Court, 1 March 1971, n° 70-10.178, 1843-2), so-called regulated agreements (L. 225-38, L. 225-86, L. 227-10), issue at a price lower than nominal if the warranty consists in a redemption (L. 225-128), issue price set by the partners (L. 225-138, II), special advantages procedure (L. 225-147), financial assistance prohibition (L. 225-216).

Note: we have also identified risks of exceeding the corporate purpose (see our legal article). A prior decision or resolution of the shareholders would be advisable.

As with warranties granted in the context of a sale, the warranty is either granted to the subscriber (compensation or reimbursement/revision of the issue premium) or granted to the issuing company (reconstitution of its assets).

The warranty can take the form of compensation in cash (compensation of the subscriber) or in additional securities (relution of the subscriber).

Note: some deem that compensation in cash is sometimes contradictory to the financing need at the origin of the subscription and that, subsequently, this compensation can weaken the company and its managers. To avoid such a situation, it is more advisable to agree on a ceiling on the warranty that would correspond to the maximum estimated goodwill in the event of risks, the remainder constituting the intrinsic residual value of the company. Generally, the compensation varies between 20.00 and 30.00% of the investment.

The technique of relution (issuance of new securities) may raise practical difficulties ("promise" of a capital increase, free allocation of shares) unless the mechanism of the allocation of share subscription warrants (known as ratchet) which could only be exercised in certain cases or of preciputary and preferential distribution of dividends via preferred shares (in both cases, the special advantages procedure is likely to be followed).

Note: for a warranty agreement agreed to by the company, its director and some of its shareholders (French High Court, 16 November 1999, No. 97-14.280).

Note: for the failure of counsel to subscribe to an asset and liability warranty in a capital increase (Grenoble Court of Appeal, 9 June 2022, No. 21/01687).

Note: the two above-mentioned judgments "doubted" the ultimate interest for the beneficiary of a guarantee taken out by the company.

Matthieu Vincent

Lawyer at the Paris Bar